Extrait :
La comparaison s’est transformée lentement mais sûrement en
compétition. Malgré deux caractères très différents, nous partagions tant de
similitudes – physique, voix, façon de marcher, tempérament – que j’avais
parfois le sentiment de me battre contre moi-même. Nous avons pourtant eu
la chance d’avoir des parents qui ne nous ont jamais réduites à notre
gémellité et qui ont refusé de faire de nous des clones vestimentaires. Ils
avaient à cœur de laisser nos caractères s’exprimer et ne nous ont jamais
habillées à l’identique. La seule fois où nous avons pris le parti d’acheter le
même tailleur, c’était pour les besoins d’une séance photo et nous avions
18 ans. C’est à cette époque que nous avons réalisé que nous ne nous étions
pas quittées plus d’une demi-journée depuis notre naissance. Ne pas trouver
ma place, c’était me fondre dans un mirage commun, me dissoudre,
disparaître en un être bicéphale. De son côté, notre sœur cadette avait le
sentiment d’être seule, elle le vivait mal et je voyais bien que notre
connexion gémellaire empiétait également sur la place des autres.
L’envie irrépressible d’exister pleinement est devenue quotidienne.
Avec ma sœur jumelle, nous savions que le seul moyen de trouver notre
juste place était d’en finir avec l’hydre à deux têtes. Elle est partie la
première et a emménagé au Pays basque. Je me suis installée un peu plus
tard à Paris
Format : pdf
Taille : 3 mb
Langue : français