Extrait :
langue de façon fort inconvenante pour se faire prendre en photo avec cette
mimique ridicule et cet air de se fiche de la tête de tout le monde. Il a même
élucubré une théorie loufoque sur la relativité générale qui lui a valu d’être la
risée du comité scientifique auquel il prétendait soumettre sa découverte, fruit
de l’intuition et de l’imagerie visuelle, sans la moindre preuve expérimentale.
Nous sommes en 1905 et ce personnage, qui aurait pu faire les délices de Courteline avec ses manches de lustrine, se prénomme Albert.
Son chef de service se lamentait si fort du comportement au travail d’Einstein :
aurait-il pu soupçonner que, pendant ce temps, ses rédactions nocturnes lui
firent publier une cinquantaine d’articles dans des revues scientifiques de
renom ? Nous lui devons dès 1905 la remise en cause des paradigmes fondamentaux de la physique, notamment la relativité du temps et de l’espace, la
découverte de l’expansion de l’univers, la courbure de l’espace-temps…
Effectivement, il faudra attendre 1915 pour que la théorie générale de la relativité soit acceptée par la communauté scientifique de l’époque, 1929 pour la
première démonstration expérimentale grâce à l’astronome américain Edwin
Hubble. Entre-temps, Albert Einstein avait décroché le prix Nobel de physique, en 1921.
Ce n’est qu’en 1964 qu’est apportée la preuve décisive de l’expansion de
l’univers grâce à l’impertinent Stephen Hawking, 22 ans, qui apostrophe en
plein amphi son éminent patron : « Vos calculs sont faux ! ». Puis Arno Penzias
et Roger Wilson obtiennent le prix Nobel de physique pour cette confirmation
opérée avec l’enregistrement du bruit résiduel de la naissance de l’univers3
. Il
était donc définitivement admis que la création de ce dernier ne remontait pas,
comme l’évêque Ussher l’avait calculée au XVIIe
siècle en additionnant l’âge
des patriarches de l’Ancien Testament, à l’aube du 20 octobre de l’an 4004
avant la naissance du Christ. Ce calcul avait pourtant reçu l’aval des trois religions se réclamant d’Abraham4
, et certaines sectes des États-Unis s’y accrochent encore en refusant une explication différente dans les manuels scolaires.