Extrait :

Les émotions représentent une affaire de sensibilité intemporelle, une histoire de sensiblerie et la question très contemporaine de l’hypersensibilité. La sensibilité, à l’origine (en 1314), désignait la propriété qu’a un être vivant, ou un de ses organes, de prendre en considération les modifications du milieu extérieur et d’y réagir de façon adéquate. La sensibilité est donc une affaire de sens et une question d’adaptation. Ce mécanisme d’adaptation par lequel un être vivant assure sa survie en se tenant au courant de tout ce qui, dans son environnement, change son intensité, modifie sa forme, augmente son attractivité ou gagne en dangerosité. Ce n’est que bien plus tard, vers 1559, qu’il a été question de définir l’être sensible comme une personne dont la vie affective est intense, apte à ressentir les impressions et à y intéresser sa personne tout entière. Notons que d’emblée, sur ses fonts baptismaux affectifs, le terme a été associé à une personnalité émotive et impressionnable. Le terme contenait une nuance péjorative qui manifestait clairement l’inconsistance de celui qu’elle désignait.